Retour sur la rencontre entre les « Sans chez-soi » et les ministres Coppieters et Neven à Namur le 19/11
Fidèle à ses valeurs et aux idéaux de l’éducation populaire, le C.I.E.P. de Liège soutient depuis 3 ans le développement du S.A.L.S.A. , le Syndicat Autonome Liégeois des Sans chez-soi Actifs. Accompagner les sans chez-soi dans la compréhension de ce qu’ils et elles vivent, décoder avec elles et eux les systèmes de domination à l’œuvre dans le marché spéculatif immobilier, produire une réflexion politique transformée en revendications tirées de leur réalités est indispensable et passionnant.
Le 10/10/2024, à l’initiative du S.A.L.S.A. les ministres wallons Yves Coppieters et Cécile Neven avaient reçu une délégation de personnes victimes de mal logement, avec ou sans chez-soi, venant de différents endroits de Wallonie. Cette délégation avait présenté des revendications construites sur base de leurs expériences pour tenter de sortir de la rue :
- Un contrôle du prix des loyers et un investissement massif dans les logements publics.
- Pas de sortie d’institution, ni d’expulsion sans réelle solution de logement.
- Un moratoire de 5 ans pour les dettes faites avant et pendant la vie en rue.
- La suppression du statut cohabitant pour les personnes sortant de la rue ou accueillant quelqu’un qui sort de la rue.
Or, depuis un an, les différentes décisions politiques plongent les personnes sans chez-soi et leurs soutiens dans une incompréhension totale, les laissant dans un sentiment de désespoir et de colère. C’est pourquoi ce 19/11/2025, soutenu par le Syndicat autonome liégeois des sans chez-soi actifs, Droit au logement Liège et Charleroi, Bithume asbl, Infirmiers de rue Liège, le C.I.E.P. Liège, le Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté, Periferia et le Rassemblement Wallon pour le Droit à l’Habitat, Culture et Développement ASBL – Marchienne Docherie une délégation de mal-logés s’est mobilisée à nouveau pour obtenir des réponses concrètes à travers une manifestation reprenant de manière sarcastique les discours de droite. Des personnes de la rue ont, cette année encore, témoigné courageusement de leurs réalités. De nombreux médias tels que Bouké, l’Avenir, RTL Info et Belga ont également relayé la manifestation.
Cela a également été l’occasion de rappeler que la non prolongation des subsides Territoire Zéro Sans-Abris entraine des fermetures de services ( abris de nuit, programme housing first , …). La Wallonie avait reçu un subside européen de 35 millions d’euros pour atteindre les objectifs de la sortie du sans-abrisme. Aujourd’hui, M. Coppieters a obtenu la somme de … 6 millions d’euros. Les associations vont devoir se battre pour récolter des miettes, beaucoup vont fermer leur porte à ceux qui ne peuvent en pousser aucune le soir pour rentrer chez eux.
Ces revendications se voulaient constructives, concrètes et efficaces.
L’année passée, nous n’avions que la déclaration de politique régionale pour discerner les intentions de cette nouvelle majorité. Un mot revenait souvent dans ce document : efficience. L’efficience, c’est être efficace avec le moins de moyens possibles… Nous, connaissant la réalité concrète, incarnée, on trouvait déjà que les moyens étaient insuffisants et qu’on était déjà à l’os, alors l’efficience dans des domaines qui déterminent la dignité des personnes en Wallonie, nous n’étions pas très confiants.
Quand on aborde la lutte pour le droit au logement, tous les sujets s’imbriquent. Toutes ces revendications sont nécessaires autant pour sortir du sans-abrisme que pour prévenir le sans-abrisme. La question n’est pas de savoir se débrouiller tout.e seul.e pour aller déposer des dossiers au AIS, aux sociétés de logements, aux maisons d’accueil ou aux propriétaires privés. La question c’est qu’il n’y a pas assez de logement pour les personnes avec un petit revenu. C’est pourquoi il est indispensable pour nous de rencontrer ensemble les deux Ministres de ces deux compétences (social et logement). On ne s’en sortira pas si on ne donne pas une conscience sociale à la politique du logement.
Or la question d’un encadrement du prix des loyers a catégoriquement été refusée par le représentant de Madame Neven. Encore mieux, concernant l’agrandissement du parc immobilier de logements publics, aucun objectif n’est fixé. Seule avancée de la part de Monsieur Coppieters : une concertation avec le secteur de l’aide à la jeunesse et de la santé mentale pour éviter la sortie d’institution sans solution de logement. Mais quel logement ? Comme en a témoigné Isabelle « la phrase « Quand on veut, on peut », c’est complètement faux. Moi je fais tout ce qu’il faut, je me reconstruis, je fais tous mes suivis et avec l’assistante sociale on cherche, on cherche, et on ne trouve pas de logement pour un seul revenu. Donc dire Quand on veut, on peut, ce n’est pas vrai. »
Tout ceci découle d’un manque de logement, le problème ce n’est pas les gens, la prévention elle se résume à avoir un nombre de logement digne avec un loyer abordable.
Quelles sont les conclusions après cette rencontre ?
Les personnes sans chez-soi ayant assisté à la rencontre nous disent :
« C’est bien de pouvoir rencontrer des ministres assez facilement, on a de la chance en Wallonie de pouvoir faire ça. »
« M. Coppieters, on sent qu’il a une écoute attentive et respectueuse mais il aimerait faire des choses mais tout se complique dans la réalité. A part une chose et l’autre du type Plan grand froid etc, le reste on peut s’asseoir dessus. »
Monsieur Coppieters a proposé de nous revoir après le conclave budgétaire pour nous présenter ses actions concrètes. Comme a répondu un membre de la délégation « OK pour aller les revoir, pour le MR, être une pierre dans la chaussure qui empêche de marcher. Pour M. Coppieters, voir ce qui ressort du conclave, et dire de ne pas arrêter les projets TZA qui ont été mis en route. Mais il a les mains liées. Et les réformes du chômage, ça va faire perdre du logement aux gens, les besoins vont augmenter et les budgets diminuent. Les politiques sociales ne s’attaquent pas au problème de l’accès à un logement pas cher. »
Ces constats, nous les avions également mis en lumière dans notre Livret noir du mal logement en région liégeoise.